J’ai les Nöels disloqués, les rêves d’enfance qui tombent en poudre, et quand ce n’est pas les gens qui se déchirent ou se désaiment, c’est simplement la vie qui craque, d’un coup, la vie brindille de ceux qu’on aime sans le leur avoir jamais dit, les qui-nous-tiennent à qui l’on tient, la vie sèche, sa fragilité, les coups de semelle qu’elle encaisse avant de voler en éclats.
D’un coup.
Brisée.
Brisée en deux secondes de voix téléphonée.
Je n’ai pas versé une larme, je tremble, c’est tout, j’ai la posture debout qui flanche en lisière d’évanouissement, je tremble dans la voix aussi, dans les mains, dans les mots sans doute, et dans le temps puisqu’il se fige tantôt ici dans ma mémoire ou tantôt là, indécis, aujourd’hui, sot d’un monde renversé, inculte d’un demain qu’il condamne parce qu’irrespirable ; le temps, oui, je tremble du temps, je tremble dans la mort liquide et de ces images d’yeux fixes, de corps abandonnés, je tremble sans pleurer ni trouver où crier dans la nuit qui s’allonge, irréelle et déserte, acide et délirante, invivable et maudite !