Il y a autant de mélancolies que de passages pour les mélancolies.
Il y a des heures ensoleillées où laisser sautiller l’heureuse mélancolie, à des époques où la lumière est blême en plein midi, où c’est toujours encore l’automne, déjà l’hiver, où le fond de l’air danse d’avance.
Il y a les heures fraîches du petit matin où la mélancolie chuchote avant l’école, toujours avant l’école, quand bien même trente ans plus tard on n’irait plus.
Il y a la place pour une mélancolie sur chaque trottoir de la ville, pour peu que l’on y découvre une lumière spéciale où laisser éclore l’à jamais.
Il y a des heures de mélancolie recroquevillées sous un châle.
Il y a sa douceur qui fond dans les herbes couchées.
Il y a une mélancolie des disparus. Elle dit l’insistante certitude d’une présence impossible. Elle fait survivre des intonations, un profil fugitif, un bijou au bras de l’aïeule – quand il se levait pour interdire à l’enfant de monter dans l’arbre, et la bouche alors criait quelque chose mais sa voix s’est perdue.
Il y a une mélancolie qui se veut nuageuse. Elle parle du passé comme d’un temps d’avant la pluie. Dès que le ciel est bas, elle se croit marcher dans l’hier.
D’autres mélancolies vivent sous la couverture. D’autres attendent au fond des trains. On trouve des mélancolies aux pieds des pommiers en septembre, et toute l’année sur les piquets de bois qui encerclent les prés.
La mélancolie se boit. Elle a des goûts, des températures, des densités qui changent selon la sorte dont elle est. Elle a sa chanson, elle fredonne, elle fredonne deux fois, mélancolie comme un visage lointain dont les yeux sont perdus. Elle ne sait plus quand elle vit. Elle se mêle à d’autres mélancolies, et bien malin qui pourra dire d’où nous regarde ce regard abreuvé à mille époques, qui les restitue toutes, d’un bloc.
Joliment dit… et surtout si bien pensé ! j’aime beaucoup ta description par petites touches de ce ressenti si crépusculaire et automnal de notre affectivité. Je crois bien que je suis en plein dedans : sentiment qu’Il est des temps révolus que nous ne revivrons jamais
Je suis encore loin, et pas remise… Il y a eu fêlure boîte cranienne.
Que cet automne te soit doux… et que l’avenir te sourit.!