24.10.2018

– dimanche !

– il était sept heures du matin

– je ne dormais plus, j’ai quitté l’immeuble

– pour chercher quoi ?

– l’automne

– qu’avez-vous fait ?

– j’ai dit à quelqu’un au hasard « on me vole l’accès à l’automne »

– et qu’a-t-il répondu ?

– il a passé son chemin

– il n’a pas dû comprendre

– il ne connaissait pas l’automne

– comment le savez-vous ?

– il allait quelque part

– quand on va quelque part, il faut bien traverser l’automne…

– mais c’est une semi-traversée, la pensée n’est pas à l’automne, elle ressasse la journée en cours

– comment pourrait-il en être autrement ?

– avec de la lenteur

– que voulez-vous dire ?

être là où l’on est, nulle part ailleurs, même en pensée

– je ne vous suis pas

– passer devant un arbre en pensant à l’arbre, rien qu’à l’arbre – rien d’autre, jamais, personne, s’arrêter comme on veut, arriver en retard à tous ses rendez-vous, en oublier qu’il y a des rendez-vous sur terre

– cet accès perdu à l’automne est la pire chose qui vous soit arrivée ?

– de l’ordre d’une amputation

– pourquoi ?

– pour l’expression d’automne qui s’attachait à ces moments

– de quoi parlez-vous ?

– d’une capacité soudaine à me dire

– elle venait donc avec l’automne ?

– je crois que l’automne, en m’envahissant, se trouvait chez lui

– vous êtes un logement pour l’automne

– tout ce que je dis de l’automne, je pourrais le dire de moi-même

– et les feuilles que vous ramassez ?

– la mine que je présente

– et la brume ?

– un chagrin que j’ai

– les couleurs ?

– un portrait de ma mère

– la balance des blancs qui se refroidit ?

– une époque à n’en plus finir d’avoir seize ans et deux amies qui rient

– et ce matin, l’automne, l’avez-vous retrouvé ?

– il se prélassait au bord de la Seille, il m’a entendue approcher avec mon appareil photo et comme cadeau, en s’échappant, il m’a fait signe – je n’ai jamais compris ce signe – ce signe incompris me rend folle

– l’ayant reçu, vous ne savez qu’en faire

– je le garderai toute ma vie comme un jouet cassé

– vos mains tremblent en le retournant

– et j’aurai les mains, toute ma vie, à ce tremblement-là

Vous avez des choses à dire ?

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s